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Je chante pour passer le temps
Petit qu’il me reste de vivre
Comme on dessine sur le givre
Comme on se fait le coeur content
A lancer cailloux sur l’étang
Je chante pour passer le tempsJ’ai vévu le jour des merveilles
Vous et moi souvenez-vous-en
Et j’ai franchi le mur des ans
Des miracles plein les oreilles
Notre univers n’est plus pareil
J’ai vécu le jour des merveillesAllons que ces doigts se dénouent
Comme le front d’avec la gloire
Nos yeux furent premiers à voir
Les nuages plus bas que nous
Et l’alouette à nos genoux
Allons que ces doigts se dénouentNous avons fait des clairs de lune
Pour nos palais et nos statues
Qu’importe à présent qu’on nous tue
Les nuits tomberont une à une
La Chine s’est mise en Commune
Nous avons fait des clairs de luneEt j’en dirais et j’en dirais
Tant fut cette vie aventure
Où l’homme a pris grandeur nature
Sa voix par-dessus les forêts
Les monts les mers et les secrets
Et j’en dirais et j’en diraisOui pour passer le temps je chante
Au violon s’use l’archet
La pierre au jeu des ricochets
Et que mon amour est touchante
Près de moi dans l’ombre penchante
Oui pour passer le temps je chanteJe passe le temps en chantant
Je chante pour passer le tempsLouis Aragon, Le roman inachevé, 1956
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Beauté des femmes, leur faiblesse, et ces mains pâles
Qui font souvent le bien et peuvent tout le mal,
Et ces yeux, où plus rien ne reste d’animal
Que juste assez pour dire : « assez » aux fureurs mâles !Et toujours, maternelle endormeuse des râles,
Même quand elle ment, cette voix ! Matinal
Appel, ou chant bien doux à vêpre, ou frais signal,
Ou beau sanglot qui va mourir au pli des châles !…Hommes durs ! Vie atroce et laide d’ici-bas !
Ah ! que du moins, loin des baisers et des combats,
Quelque chose demeure un peu sur la montagne,Quelque chose du cœur enfantin et subtil,
Bonté, respect ! Car, qu’est-ce qui nous accompagne,
Et vraiment, quand la mort viendra, que reste-t-il ?Paul Verlaine, Sagesse (1881)
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Je chante pour passer le temps
Petit qu’il me reste de vivre
Comme on dessine sur le givre
Comme on se fait le coeur content
A lancer cailloux sur l’étang
Je chante pour passer le tempsJ’ai vévu le jour des merveilles
Vous et moi souvenez-vous-en
Et j’ai franchi le mur des ans
Des miracles plein les oreilles
Notre univers n’est plus pareil
J’ai vécu le jour des merveillesAllons que ces doigts se dénouent
Comme le front d’avec la gloire
Nos yeux furent premiers à voir
Les nuages plus bas que nous
Et l’alouette à nos genoux
Allons que ces doigts se dénouentNous avons fait des clairs de lune
Pour nos palais et nos statues
Qu’importe à présent qu’on nous tue
Les nuits tomberont une à une
La Chine s’est mise en Commune
Nous avons fait des clairs de luneEt j’en dirais et j’en dirais
Tant fut cette vie aventure
Où l’homme a pris grandeur nature
Sa voix par-dessus les forêts
Les monts les mers et les secrets
Et j’en dirais et j’en diraisOui pour passer le temps je chante
Au violon s’use l’archet
La pierre au jeu des ricochets
Et que mon amour est touchante
Près de moi dans l’ombre penchante
Oui pour passer le temps je chanteJe passe le temps en chantant
Je chante pour passer le tempsLouis Aragon, Le roman inachevé, 1956
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O Nature, ô ma mère, à ta voix, qui du ciel
Semble couler en moi, comme un fleuve de miel,
A tes accents d’amour, à tes douces paroles,
Aux parfums exhalés de toutes tes corolles,
Aux chants mélodieux des bois et des oiseaux,
Et des lacs azurés baignant tes verts roseaux, —
Je sens le flot vital d’un fluide sonore,
Comme aux jours regrettés, qui me pénètre encore,
Et mon âme, docile aux accords de tes lois,
D’un sympatique écho vibre comme autrefois ;
Je sens ton action, si tranquille et si forte,
Le mouvement réglé, le rhythme qui t’emporte,
Et ta sève, et ta vie, et ta sérénité,
Et de ton front d’azur l’immuable beauté ;
Je sens dans ton sourire inondé de lumière,
Je sens, sous ton regard, tout l’amour d’une mère ! —
O Nature, prends-moi, conduis-moi dans tes bois ;
Seul à seule au désert, que j’écoute ta voix !
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