• Le doudou ne savait pas mais peu m''importe j'aime.

    Barbara (Monique Serf 1930-1997) 

    Comme de nombreuses familles juives, la famille Serf se cache pendant la guerre, de ville en ville, pour échapper aux dénonciations et aux rafles. Les valises sont toujours prêtes pour un éventuel départ précipité.
    Le film « De Monique Serf à Barbara » évoque les deux années passées à Saint-Marcellin entre 1943 et 1945.
    (Les images sont tirées du documentaire de Pierre Kukawka 2007)


    C'est ainsi qu'à lété 1943 nous débarquons à Saint-Marcellin, à proximité du Vercors, haut lieu de la Résistance.
    C'était difficile de passer inaperçus lorsque nous arrivions dans une nouvelle localité. Nos parents nous recommandaient de ne rien dire de notre vie.
    Ne rien dire, avec cette différence physique et l'arrogance avec laquelle je disais, justement, que j'étais juive .....


    Mon enfance

    J'ai eu tort, je suis revenue
    dans cette ville loin perdue
    ou j'avais passe mon enfance.
    J'ai eu tort, j'ai voulu revoir
    le coteau ou glissaient le soir
    bleus et gris ombres de silence.
    Et je retrouvais comme avant,
    longtemps apres,
    le coteau, l'arbre se dressant,
    comme au passe.
    J'ai marche les tempes brulantes,
    croyant etouffer sous mes pas.
    Les voies du passe qui nous hantent
    et reviennent sonner le glas.
    Et je me suis couchee sous l'arbre
    et c'etaient les memes odeurs.
    Et j'ai laisse couler mes pleurs,
    mes pleurs.
    J'ai mis mon dos nu a l'ecorce, 
    l'arbre m'a redonne des forces
    tout comme au temps de mon enfance.
    Et longtemps j'ai ferme les yeux,
    je crois que j'ai prie un peu,
    je retrouvais mon innocence.
    Avant que le soir ne se pose
    j'ai voulu voir
    les maisons fleuries sous les roses,
    j'ai voulu voir
    le jardin ou nos cris d'enfants
    jaillissaient comme source claire.
    Jean-Claude, Regine, et puis Jean -
    tout redevenait comme hier -
    le parfum lourd des sauges rouges,
    les dahlias fauves dans l'allee,
    le puits, tout, j'ai tout retrouve.
    Helas
    La guerre nous avait jete la,
    d'autres furent moins heureux, je crois,
    au temps joli de leur enfance.
    La guerre nous avait jetes la,
    nous vivions comme hors la loi.
    Et j'aimais cela. Quand j'y pense
    ou mes printemps, ou mes soleils,
    ou mes folles annees perdues,
    ou mes quinze ans, ou mes merveilles -
    que j'ai mal d'etre revenue -
    ou les noix fraiches de septembre
    et l'odeur des mures ecrasees,
    c'est fou, tout, j'ai tout retrouve.
    Helas
    Il ne faut jamais revenir
    aux temps caches des souvenirs
    du temps beni de son enfance.
    Car parmi tous les souvenirs
    ceux de l'enfance sont les pires,
    ceux de l'enfance nous dechirent.
    Oh ma tres cherie, oh ma mere,
    ou etes-vous donc aujourd'hui?
    Vous dormez au chaud de la terre.
    Et moi je suis venue ici
    pour y retrouver votre rire,
    vos coleres et votre jeunesse.
    Et je suis seule avec ma detresse.
    Helas
    Pourquoi suis-je donc revenue
    et seule au detour de ces rues?
    J'ai froid, j'ai peur, le soir se penche.
    Pourquoi suis-je venue ici,
    ou mon passe me crucifie?
    Elle dort a jamais mon enfance.

    « Le doudou finira ce soir par Paul PersonneLili tu as fini toutes tes lectures? »

  • Commentaires

    1
    Vendredi 25 Juillet 2014 à 15:12

    C'est magnifique !

    Il faut éviter de revenir sur ses pas, c'est parfois trop douloureux... l'oubli n'existe pas... tout sommeille à l'intérieur et le moindre pas en arrière peut nous crucifier sur place... Attention DANGER !

    Je te souhaite un bon week-end, bisous doux Doudou

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